Ateliers des Arts Sacrés - L'enseignement pratique
Pratique picturale et pratique musicale sont enseignées en atelier.
La vertu essentielle du travail en atelier est évidemment l’échange des regards portés sur le travail en cours, mais aussi le contact personnel essentiel, en ce qu’une œuvre d’art n’est pas un produit purement technique, mais l’œuvre d’une personne à laquelle elle est appropriée. Et il faut ici entendre « personne » dans toutes ses déterminations, notamment celle de son corps incarné, car produire une œuvre d’art consiste en l’effectuation de gestes vivants qui ne peuvent se transmettre, s’explorer et se vivre que dans le commerce direct des personnes, un regard guidant l’autre, une main guidant l’autre.
Un atelier trouve ainsi sa raison d’être en fondant non pas une « société », mais une communauté de travail dans laquelle chaque œuvre, en restant irréductiblement personnelle, se nourrit de cette relation communautaire seule capable d’enrichir à la fois la méditation et le geste nécessaires à son originalité, et de former le travail de l’artiste dans le respect de sa singularité. C’est ce qu’une relation frontale entre un détenteur de savoir technique et une cohorte d’imitateurs plus ou moins appliqués, ou entre un apprenti esseulé et une information dispensée par quelque médium que ce soit (fût-ce le plus technologiquement sophistiqué), ne saurait remplacer.
L'atelier de Fresque
« La couleur est une nécessité vitale. C’est une matière première indispensable à la vie, comme l'eau et le feu. On ne peut concevoir l'existence des hommes sans ambiance colorée, les plantes, les animaux se colorent naturellement, l'homme s'habille en couleurs. Son action n'est pas que décorative ; elle est psychologique. Liée à la lumière, elle devient intensité ; elle devient un besoin social et humain. Le sentiment de joie, d'émulation, de force, d'action se trouve renforcé, élargi par la couleur. »
Fernand Léger
Il s’agit d’une formation approfondie des élèves à la technique a fresco, au travers de la réalisation de compositions de petite et grande surface. Cette expérience permet à l'élève de progresser, d'éveiller peu à peu sa sensibilité et aussi d'acquérir les connaissances nécessaires pour l'exécution de fresques de grandes dimensions liées à des programmes architecturaux.
Le métier de fresquiste nécessite un réel apprentissage. Pour chaque réalisation de fresque, sont nécessaires des études préalables, la fabrication du support mortier et enduit, puis l'exécution de la composition sur l'enduit frais, avec la possibilité d’étude et de confrontation aux fresques et œuvres du passé ou sur des projets artistiques dans des volumes architecturés. Si la technique de la fresque vient du fond des âges, elle est toujours bien actuelle, et la grande simplicité des matériaux utilisés, pigments, chaux, sable, eau, permet aux fresquistes un ressenti très sensible de la couleur et de l’espace.
La mise en forme de ce travail devra permettre la découverte des exigences particulières à cette technique selon une approche directe. La réalisation des projets de fresque éveille au sentiment d’un espace coloré, au travers de l’expérience vécue du travail en atelier. La pratique de la peinture a fresco ouvre à une perception sensible de la fonction et du rôle de l'artiste dans l'architecture et dans la société. Les réalisations artistiques in situ ont ceci de particulier qu’elles doivent répondre à des exigences et des contraintes liées aux lieux dans lesquelles elles sont réalisées. Chaque lieu, chaque espace, possède un potentiel de réaction artistique. Il faudra donc écouter et répondre à ces exigences et à ces contraintes qui leur sont associées.
Les commanditaires, les usagers, la fonction du lieu, son histoire, son architecture, les accès, la topographie, la lumière, etc : autant de paramètres dont il faut tenir compte. Tous ces éléments impliquent que l’on se remette en question et nécessitent des recherches spécifiques. A cela vient s’ajouter le propre et légitime désir de création de l’artiste. Ce sont donc des projets complexes et chaque fois différents. En cela ils sont novateurs et porteurs de création car ils permettent de découvrir des domaines que l’artiste n’aurait peut-être jamais examinés. Il s’agit d’un dialogue, d’un réel échange qui autorise la mise au jour d’un projet artistique.
Le travail se fait en étroite relation avec les autres ateliers du centre de formation dédié à l’art sacré, dans un esprit d'ouverture, de contact, de concertation, pour permettre une dynamique de l'échange, pour générer et soutenir des initiatives autorisant le dépassement du travail de chacun. Je fais le souhait qu’au travers des projets et des réalisations cela soit l'occasion d’établir des ponts entre les étudiants en art, les étudiants en philosophie, en théologie, en architecture, et aussi avec tous ceux qui peuvent s'impliquer dans une réalisation artistique en relation avec l'architecture, la cité et l'urbanisme, les arts sacrés.
Philippe Bennequin
L'atelier de Peinture à l'Huile et Peinture a Tempera
L’atelier de peinture à l’huile sur toile et de peinture a tempera (medium à l’oeuf sur panneau de bois, méthode traditionnelle de réalisation des icônes orthodoxes et de l’art religieux occidental avant le XVe siècle) proposera à l’élève une immersion dans le quotidien du peintre. En lui donnant les moyens de ses ambitions, il fournira à l’élève les clefs du passage de la théorie, de l’inspiration, à la pratique et surtout à la réalisation concrète d’une œuvre, de la préparation du support au vernissage.
L’atelier est en effet le lieu où se réalise ce mystère : quelque chose naît de rien, ou plutôt l’indéterminé prend forme ordonnée.
Autrefois, la formation en atelier était un passage obligé : elle est en effet un laboratoire permettant de franchir plus rapidement les étapes. Car le but du peintre est assez simple : sur un morceau de toile défini, il doit faire surgir une fenêtre, par le biais d’outils, de couleurs et de gestes millénaires. Cette fenêtre n’est pas destinée à lui-même, ou pas seulement ; c’est une fenêtre pour chacun, qui doit s’ouvrir - théoriquement - pour chacun.
C’est en ce sens que certaines œuvres sont universelles, car elles s’adressent à l’intime (le sentiment) de chacun. La personne rencontre l’univers, et l’harmonie blessée par la violence est restaurée.
Entrer en peinture est donc un état d’esprit tout particulier, qui nécessite une intimité entre la main, l’œil et le cœur.
L’esprit, si utile à l’élaboration de l’idée, se confronte à la matière, au corps lui-même, en un geste et une symbiose qui ne sont pas sans rappeler le geste de Dieu Créateur, dans la tradition biblique ; les traditions orientales parleront plutôt de retrouver en soi le souffle même de la Vie, du mouvement de la Nature.
La pratique en atelier est la salle d’accouchement de la création. La réalisation d’une peinture est toujours une mise en jeu de soi-même, car l’idée originale diffère souvent du résultat pratique. L’apprentissage de la peinture passe par cet accueil de l’accident et par les possibles qu’il peut engendrer, et par les techniques qui permettent la maïeutique de l’image.
Notre société, infestée d’images inutiles, a besoin de peinture. Cet atelier se propose de transmettre et d’intégrer les traditions du paysage, du portrait et de la composition pour les reformuler, à l’aide des propres forces créatives de chacun et dans un esprit de renouvellement. Nous créerons ainsi, je l’espère, des peintures propices à la réflexion, au questionnement, au besoin de beauté de nous tous.
Dorothée Sers
Les ateliers de Musique Sacrée
La musique constitue un des aspects des pratiques liturgiques anciennes ayant donné naissance à ce que notre époque a ressemblé sous le titre de « beaux-arts », puis tout simplement d’ « art ». Son lien par nature spécifique à l’expression verbale, constitue le fondement de l’expression de la Foi issue de la Révélation transmise par l’Écriture. Dans la tradition, ce lien lui a assuré une place qui, contrairement à celle de l’image, n’a jamais été mise en cause, sauf dans les manières de la mettre en œuvre, mais jamais dans son principe même, puisqu’elle constitue d’abord un élément qui ne peut être abstrait de la parole, elle aussi modelée dans le rythme et le ton. Mais la tradition de l’Église, outre cet aspect conservé dans l’exercice du chant grégorien, a également su intégrer des pratiques
plus actuelles — notamment instrumentales — qui engagent une toute autre relation de cet art à la liturgie, selon des modalités qui lui sont propres.
Les ateliers de musique sacrée — ou plutôt devrait-on dire de musiques sacrées, tant sont diverses les traditions dans le christianisme autant que les pratiques plus actuelles — visent ainsi par un travail en commun, à explorer et à approfondir le lien intime qui unit la musique à la spiritualité chrétienne, non seulement en sa dimension de vocalisation de l’Écriture sainte, mais aussi à partir de sa puissance de révélation propre.